CD Projekt Red est à l'origine de jeux exceptionnels qui redéfinissent les normes des jeux de rôle. The Witcher 3, qui fête ses dix ans d'existence, reste largement considéré comme la plus grande expérience de jeu de rôle jamais créée. De même, Cyberpunk 2077 a subi une transformation impressionnante grâce à des mises à jour substantielles pour devenir l'une des aventures en monde ouvert les plus riches du jeu. Ces titres phares ont cimenté la réputation du studio, au même titre que les autres jeux acclamés par la critique.
L'art du récit cohérent
Ce qui distingue vraiment le travail de CDPR, c'est la façon dont les différents éléments s'interconnectent de manière transparente pour former un monde crédible qui réagit aux décisions du joueur. Bien que de nombreux développeurs utilisent des cadres RPG similaires, peu d'entre eux atteignent le niveau de narration immersive de CDPR. Le secret du studio réside dans la création de relations authentiques entre la narration, l'environnement et le développement des personnages.
Patrick Mills, responsable de la stratégie de contenu de CD Projekt Red, note que les limitations techniques restreignent souvent les visions créatives des développeurs : "On peut voir un projet ambitieux qui ne se concrétise pas complètement, mais ce n'est pas un manque d'effort - parfois, les outils ne peuvent tout simplement pas fournir ce que l'équipe a imaginé.
Le studio a consacré d'énormes ressources au développement de sa technologie propriétaire REDengine au cours de quatre itérations. Cette boîte à outils personnalisée permet de créer un réseau complexe de systèmes interconnectés qui donnent aux choix des joueurs un véritable impact. L'évolution de la technologie a permis au studio de concevoir des quêtes de plus en plus sophistiquées, qu'il s'agisse des aventures axées sur le combat de The Witcher ou des divers styles de jeu de Cyberpunk qui intègrent la furtivité, le piratage et des approches variées de la résolution de problèmes.
Maîtriser les choix significatifs
Miles Tost, responsable de la conception des niveaux, insiste sur l'importance de la variété : "Dans les RPG à grande échelle, nous devons constamment rafraîchir l'expérience pour maintenir l'engagement du joueur, quelle que soit la qualité de la narration." L'approche narrative de CDPR consiste à créer des quêtes aux rebondissements captivants qui tiennent compte des innombrables comportements des joueurs grâce à des "tests de destruction" rigoureux.
Le studio a affiné son approche en matière de prise de décision, dépassant les systèmes moraux binaires. Les joueurs sont confrontés à des dilemmes où les "bons" choix peuvent avoir des conséquences négatives, tandis que les décisions moralement ambiguës peuvent produire des résultats bénéfiques. Cette philosophie se retrouve dans le choix ultime de Phantom Liberty entre Songbird et Reed, où les deux options présentent des perspectives justifiables mais contradictoires.
Sebastian Kalemba, directeur du jeu, explique cette philosophie : "Nous voulons que les décisions soient gratifiantes, même si le résultat est douloureux". Cette résonance émotionnelle provient de la mise en place méticuleuse du contexte avant de présenter les choix, ce qui permet aux joueurs de prendre des décisions en connaissance de cause plutôt que de faire des suppositions à l'aveuglette.
Le studio a pris un tournant décisif avec la conclusion de l'Acte 1 de The Witcher 2, qui suscite la controverse, où le choix entre Vernon Roche et Iorweth donne lieu à des segments de jeu totalement différents. Bien qu'elle ait nécessité beaucoup de ressources, cette structure ambitieuse a démontré l'engagement de CDPR en faveur d'une participation significative des joueurs.
Tirer les leçons des défis
Le lancement de Cyberpunk 2077 a révélé les défis liés à la communication claire des conséquences dans un environnement urbain tentaculaire. Le directeur du jeu Paweł Sasko réfléchit : "Notre structure Witcher rendait les conséquences visibles en revenant sur les lieux - cela s'est avéré plus difficile dans la complexité de Night City." Phantom Liberty a remédié à ce problème avec des boucles de rétroaction plus explicites pour les décisions des joueurs.
Alors que le studio passe à l'Unreal Engine 5 pour son prochain titre Witcher, il entend pousser encore plus loin les mécanismes de choix et de conséquences. "Nous voulons faire évoluer la franchise en donnant aux joueurs davantage d'outils pour façonner leur expérience, tant sur le plan narratif que mécanique", déclare Kalemba, en mettant l'accent sur l'autonomie du joueur comme objectif principal pour l'avenir.